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Discours du doyen de fonction du Grand Conseil – M.Albert Pitteloud
Lors de la séance constitutive du Grand Conseil, le doyen du Parlement dirige les débats jusqu'à l'élection du président. Pour cette nouvelle législature, cette charge a été assumée par M.Albert Pitteloud, député UDC du district de Sierre, dont voici le discours d'introduction:
Madame la présidente,
Messieurs les Conseillers d’État,
Mesdames et Messieurs les députés,
À la différence de mon illustre prédécesseur, Maître Edmond Perruchoud, qui à la force du poignet s’est doté d’une formation universitaire supérieure, pour ma part je n’ai accompli que 3 écoles. Les écoles primaires et un peu de secondaire, où j’ai surtout bien retenu l’histoire de mon pays et de ceux qui nous entourent. Une école d’agriculture où j’ai pris connaissance que la vie sur terre était possible grâce aux conclusions d’ Archimède et Newton et par l’existence de la photosynthèse. Et une école de recrues où, instruit comme grenadier, un officier supérieur nous a inculqué l’importance des objectifs à définir, leur évaluation, afin de les réaliser avec le minimum d’impondérables. Dans mon école de la vie j’ai tâché tant bien que mal de mettre en pratique ces principes. Lorsque j’ai été victime d’impondérables c’était rarement dû à la malchance mais souvent à une évaluation incomplète des objectifs et dans ces cas-là le diable se cache dans le détail.
Mon expérience de parlementaire a débuté à de la réception de Monsieur Mangisch président du Grand Conseil en 2005. Durant le banquet j’ai été placé au côté de Paul Schmidhalter, ingénieur civil. Lors de notre entretien il m’a fait part de son amertume concernant la polémique issue des différents choix de variantes d’autoroutes dans le Haut-Valais. Il est arrivé à la conclusion suivante, je le cite : « Les réserves que j’ai émises concernant les problèmes géologiques et hydro-géologiques contenu dans la variante du projet retenu auront des conséquences énormes sur les coûts et délais de réalisations du projet. » Et de conclure « Dans moins de dix ans les faits me donneront raison mais je ne serai pas là pour le voir car je vais bientôt mourir. » Effectivement, atteint dans sa santé, il nous quitta peu après.
6 ans plus tard, comme membre de la commission des constructions et de l’équipement, j’ai participé à une séance sur le chantier de l’autoroute dans le Haut-Valais. Le responsable de l’époque nous a fait part des problèmes hydro-géologiques rencontrés et de leur persistance. Il est arrivé à la même conclusion que Paul Schmidhalter et a admis que l’on avait fait un très mauvais choix de variante que l’on peut déjà constaté aujourd’hui par des coûts et délais de réalisation 3 à 4 fois plus élevé que prévu. On répète les mêmes erreurs dans le choix de la variante de correction de notre petit fleuve alpin à qui l’on veut donner une dimension pharaonique au mépris des fondamentaux de la physique, de la biologie, de l’économie et d’aménagement du territoire.
Dans ces 2 exemples on constate que l’orgueil et l’idée d’abandon ont prévalu sur toute autre considération. Dans d’autres cas c’est par omission que l’on se rend coupable d’irresponsabilité. Il suffit de constater l’état de nos routes qui nécessitent pour leur maintenance un investissement annuel de 150 millions de francs auxquelles on a alloué des sommes de 30 à 40 millions par années durant ces 10 dernières années.
Constat mathématique: à ce jour nous avons un milliard de retard sur l’entretien de nos routes auxquelles s’ajoutent 300 millions de retard sur l’entretien des bâtiments avoué par l’architecte cantonal. Pour couronner le tout, nos caisses de pension du personnel de l’état affichent à ce jour à nouveau un déficit de 700 millions de francs. Ainsi nous avons au total 2 milliards de retard d’investissement concernant la maintenance de nos caisses de pension et de notre patrimoine immobilier. Ces données n’apparaissent pas dans le bouclement comptable 2016 de l’état du Valais.
Notre réseau santé Valais a pu sortir de son comas artificiel suite à une expertise neutre extérieure au canton.
Ces constats engagent la responsabilité du législatif et de l’exécutif qui se doivent de tirer les conclusions qui s’imposent afin de neutraliser l’orgueil ou la cupidité de quelques individus ou groupes d’intérêts au dépens de l’intérêt général. Pour y parvenir il faut rompre avec la collégialité de convenance appliquée de manière doctrinaire afin de traiter l’objet prioritairement. Le frein aux dépenses commence par des coupes sombres au gaspillage.
Concernant l’économie privée, notre tourisme devrait se diversifier, vu l’évolution démographique, vers la clientèle du troisième âge. Nos forces hydrauliques qui ont malheureusement subi la concurrence déloyal du nucléaire qui n’a jamais sérieusement introduit dans ses coûts la fermeture des centrales et la gestion des déchets subissent aujourd’hui celle tout autant déloyale de l’énergie verte fortement subsidiée. La solution pour revaloriser notre énergie hydraulique serait la livraison de notre électricité pour des voitures électriques de ville avec comme avantage le label vert, la stabilité des prix sur le long terme et la souplesse de production.
À ce jour tout le monde souhaite l’enterrement des lignes à haute tension. Mais pour que ces souhaits ne restent pas au stade de vœux pieux, il convient de choisir le tracé le plus court avec un minimum d’obstacles situé au pied des berges du Rhône actuelles. Ce parcours permet d’imposer aux producteurs d’électricité une solution techniquement et économiquement acceptable. En conséquence il faudra choisir entre la possibilité d’enterrement de lignes et le projet pharaonique et dispensieux imposé à notre fleuve alpin.
La revalorisation de notre eau potable contenue dans nos barrage exempte de micro-polluants passe par la réalisation du projet Aqueduc. Notre industrie, comme tous les autres secteurs de l’économie, attend de l’état prioritairement des conditions-cadres favorables à son développement. La survie de notre agriculture dépend impérativement de la non-adhésion à l’Union Européenne et de la non-ratification d’accords de libre-échange.
Force est de constater que nous habitons malgré tout dans un beau pays qui s’appelle la Suisse. Contrairement aux pays voisins, notre pays a évité guerres, aventures coloniales et génocides par le simple fait que les citoyens de ce pays ont bénéficié d’institutions qui leur ont permis de décider ou d’orienter leur destin. Ces valeurs sont bien évidemment la démocratie directe avec les droits d’initiative et de référendum qui permet le contrôle par le peuple des politiques, le fédéralisme qui permet aux minorités de s’exprimer, et la neutralité formelle qui empêche de reporter les problèmes internes sur le voisin. Toutes ces valeurs ne sont en aucun cas négociables. Leur porter atteinte c’est franchir le Rubicon de la trahison et de ce fait adhérer au totalitarisme. Pour un avenir serein il faudra rester vigilant. Vive le Valais et vive la Suisse !